Actions préventives

Une étude sur les solution alternatives de lutte contre la chenille Processionnaire du Chêne

Chenilles processionnaires
Chenilles processionnaires © Seine-et-Marne Environnement
La chenille processionnaire du chêne est un ravageur important spécifique des chênes qui occasionne des pertes de feuilles importantes sur les arbres, et est redoutée pour les urtications qu'elle provoque chez l'homme et chez les animaux.

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Le constat

 

Bien que la chenille processionnaire du chêne (Thaumetopoea processionea L.) soit une espèce autochtone, et connue depuis toujours pour les urtications qu’elle provoque et pour ses cycles d’explosions démographiques sur des périodes de l’ordre de 3-4 ans, elle voit, sur certains territoires, sa population exploser et ne pas décliner par la suite.

Pour limiter le recours aux insecticides, qui se retrouvent par la suite dans les nappes phréatiques et les cours d'eau, des pièges à phéromones peuvent être utilisés pour lutter contre certains insectes. Or, cette technique n'est actuellement pas efficace pour cette espèce de processionnaire.

L’étude et ses résultats

Différents stages et services civiques ont été réalisés sur le sujet et ont permis d’initier un suivi des populations de cette chenille, ainsi que des recherches sur ses prédateurs naturels, tout en déterminant des hypothèses sur cette explosion.

Ainsi, pendant 4 ans, l’association Seine et Marne environnement (SEME), organisme associé au Département de Seine-et-Marne, a mis en place une expérimentation en forêt domaniale de Villefermoy avec l’accord de l’ONF et en synergie avec la FREDON Ile-de-France.

L’objectif était d’identifier des solutions alternatives pour contenir les populations de ces chenilles.

Comme toute espèce locale (contrairement aux espèces exotiques envahissantes, qui sont déconnectées de leur environnement naturel), la processionnaire du chêne a des prédateurs et des parasites qui, justement, sont là pour réguler les populations.

Ainsi, la présence de ces prédateurs a pu être mise en évidence dans la forêt de Villefermoy : des oiseaux comme les mésanges, notamment charbonnières, et le coucou gris, des chauves-souris comme la pipistrelle commune, les pipistrelles de Kuhl et de Nathusius ou encore la sérotine commune, ainsi que différentes espèces de coléoptères connues pour manger les chenilles comme le Grand Calosome. La présence de plusieurs parasites de la chenille processionnaire du chêne a également pu être montrée.

En essayant de comprendre pourquoi ces espèces prédatrices et parasites n’arrivent pas à réguler les populations de chenilles processionnaires du chêne, différentes hypothèses ont été émises, dont certaines ont déjà pu être validées par d’autres études :

  • le changement climatique fait que le débourrement des chênes a lieu plus tôt en saison qu’auparavant, déclenchant l’activité des chenilles processionnaires. Or, les mésanges ne nichent pas suffisamment tôt et, lorsqu’elles commencent la prédation pour nourrir leurs couvées, les chenilles deviennent vite urticantes et donc impropres à l’alimentation des jeunes. Ce même changement climatique est aussi à l’origine d’hivers plus doux, et donc moins traumatisants pour les populations de processionnaires.
  • les prédateurs insectivores sont tous en déclin du fait de la modification des paysages et de la disparition d’une partie de leurs ressources alimentaires due aux usages d’insecticides : déclin de 30 % des sérotines communes, de 9 % des pipistrelles communes et de 46 % des pipistrelles de Nathusius à l’échelle nationale. De même, le coucou gris voit ses populations chuter en Ile-de-France.

Malgré tout, la forêt de Villefermoy reste un endroit privilégié. Toutefois, deux phénomènes sont à relever : la raréfaction du bois mort et celle du vieux bois à cavités, qui sont défavorables aux prédateurs de chenilles. Chauves- souris et mésanges utilisent les cavités d’arbres dans leur cycle de vie et notamment pour leur reproduction. Or, en posant des nichoirs et des gîtes à chauves-souris, ceux-ci sont colonisés, ce qui montre que le manque de cavités dans les arbres est un facteur limitant à leur développement. De même, la plupart des coléoptères prédateurs des chenilles processionnaires sont liés à la présence de bois mort. Un changement dans l’exploitation du massif a donc pu contribuer à la perturbation de ces espèces.

Par ailleurs, des traitements aux Bti (Bacille de Thuringe) ont eu lieu, non pas dans la forêt de Villefermoy, mais dans des forêts privées alentours. Or, bien qu’il s’agisse d’une lutte biologique, ce bacille impacte toutes les populations de papillons. Cet effet non sélectif déstabilise l’ensemble de la chaîne alimentaire, car les prédateurs se retrouvent sans proie pour s’alimenter. D’autre part, en créant un vide écologique, ces traitements favorisent les espèces à forte dynamique pour recoloniser le milieu naturel, et notamment la processionnaire du chêne. La chaîne alimentaire nécessitera alors quelques années pour se reconstituer. Il en est de même pour les parasites, qui n’auront plus de chenilles à parasiter.

Pour le cas particulier des chênes en ville, il s’avère que l’éclairage public est certainement responsable d’une aggravation de la situation. En effet, la plupart des prédateurs, insectes et chauves-souris, sont lucifuges et donc fuient ces zones. Or, le papillon adulte (imago) de la processionnaire est, quant à lui, attiré par les lampadaires, ce qui favorisent sa reproduction et donc sa ponte sur des chênes urbains plutôt qu’en forêt. Ce phénomène semble donc accentuer le problème de prolifération de processionnaires du chêne dans les bourgs, les villes et en lisière de forêts.

Quelques solutions

Compte tenu de son impact, les traitements au Bti doivent être réalisés uniquement de façon localisée.

Bien qu’efficace, les opérations utilisant un aspirateur spécialisé sont lourdes à mettre en place : elles nécessitent un élévateur et une protection individuelle importante.

Un peu plus légère mais restant lourde, la technique de brûlage des nids est à faire faire par une société spécialisée et à appliquer essentiellement sur des arbres problématiques en ville.

Par ailleurs, éteindre en août l’éclairage public peut éviter d’attirer les papillons vers les habitations.

De même, la pose de nichoirs à mésanges et de gîtes à chauves-souris est recommandée. En plus de favoriser le développement d’espèces prédatrices de la processionnaire (des larves ou des adultes), cette action contribuera à aider au maintien des populations de mésanges et chauves-souris.

Enfin, toute action visant à préserver, dans l’écosystème, du bois mort au sol et sur pied, ainsi que des arbres à cavités sera favorable à de nombreuses espèces, notamment à de nombreux prédateurs de la processionnaire du chêne.

Des pistes pour la suite

Pour des arbres isolés, des tests de certaines huiles essentielles ont été réalisés. Ces huiles semblent limiter la comestibilité du feuillage. Cette pratique, qui pourrait être utilisée en injection, nécessite toutefois des tests plus avancées et notamment des autorisations d’utilisation.

Le lâcher de Grand Calosome après élevage, ou encore le lâcher de parasites, serait aussi envisageable mais il faut évaluer l’impact sur les écosystèmes au préalable, et ce type d’action nécessite également des autorisations.

Enfin, le travail sur l’amélioration des phéromones sexuelles se poursuit. Cela permettrait des piégeages de chenilles processionnaires et des pratiques de confusions sexuelles.

 

Dans tous les cas, compte tenu de l’importance des chênes dans l’écosystème (plus de 1000 autres espèces en dépendent), il convient de tout faire pour les préserver en forêt, mais aussi en ville, car ces arbres sont d’importants relais de la trame verte et bleue.

Pour tout renseignement complémentaire, contacter l'association Seine et Marne Environnement 

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